Vice a interviewé Philip Steel, chasseur de drones dans le Colorado


Dans l'Ouest américain, un dénommé Philip Steel s'est trouvé de nouveaux ennemis : les drones ! Non seulement il entend bien abattre tous ceux qui passeront au-dessus de sa tête, mais il aimerait inviter (contre récompense) ses concitoyens de la petite ville de Deer Trail dans le Colorado à faire de même. Vice à rencontré ce cow-boy un peu illuminé qui a déjà présenté un projet d’ordonnance municipale visant à autoriser les habitants de sa ville à dégommer les drones, et à les rémunérer s'ils y parviennent. L’ordonnance, rejetée en août, pourrait bien être acceptée en seconde lecture début octobre.

VICE : Salut Philip. Avant qu’on entre dans les détails de la chasse aux drones, vous pouvez me dire d’où vous est venue l’idée ?
Philip Steel : Ouais. En septembre 2015, l’Administration de l’aviation civile (FFA) va mettre en place de nouvelles directives pour que ce qu’elle appelle « l’espace aérien navigable » soit élargi jusqu’au niveau du sol. C’est vraiment un gros problème. En gros, ça veut dire que tout objet évoluant dans cet espace – et pas uniquement l’aviation traditionnelle, comme c’est le cas actuellement – sera sous juridiction fédérale. Selon cette définition, lorsque quelqu’un fera du tir ou jouera au baseball, les projectiles seront dans l’espace aérien navigable. Pour construire un bâtiment, il faudra une permission gouvernementale. Ça outrepasse complètement les droits de notre Etat.

Et l’ordonnance concernant la chasse aux drones est une réaction à ça ?
Le but de cette ordonnance est avant tout de réclamer la souveraineté totale et notre suprématie sur l’espace aérien de la ville de Deer Trail, Colorado, soit un espace d’environ 2,6 km2 et d’environ 500 habitants. Nous nous déclarons souverains de notre espace aérien, jusqu’à une altitude de 305 mètres.

Et que viennent faire les drones là-dedans ?
Notre devise, c’est : « Si vous ne voulez pas voir vos drones détruits, ne passez pas par ici. » On délivre des permis de chasse au drone. Quand on apercevra des drones, on les abattra avec nos fusils. Je ne parle pas des drones Predator à 25 millions de dollars, qui volent à plus de 300 mètres d’altitude. Je parle des petits, ceux qui font la taille d’un oiseau. Ils volent près du sol. Ils sont destinés à la surveillance. Ils sont équipés de technologie thermique et peuvent quasiment voir à travers les murs.

Vous avez peur que ce genre de surveillance se développe à grande échelle ?
Voilà le problème : on pourrait très bien faire confiance au gouvernement, ce qui n’est pas le cas, mais les criminels aussi pourraient utiliser des drones pour surveiller le quartier. Les pédophiles pourraient s’en servir pour prendre des gamins en photo. Les terroristes aussi pourraient faire de la reconnaissance ou conduire des attaques chimiques ou biologiques. Les grosses entreprises s’en serviront pour collecter des données sur leurs clients. L’ordonnance fixe des lignes de conduite très précises sur le type d’armes à feu et de munitions qui peuvent être utilisées contre des drones, ainsi que les méthodes d’approche.

OK, je comprends. Et comment ça marche, les récompenses ?
On reçoit une récompense de 25 dollars pour un morceau de drone. Un drone entier, c’est 100 dollars. On appelle ça des trophées, dans l’ordonnance, et la ville peut s’en servir pour se faire de la publicité.

Si je comprends bien, l’ordonnance légalise le tir sur des objets non-habités volant à moins de 305 mètres d’altitude au-dessus de Deer Trail, et l’encourage financièrement ?
Oui, elle en fait même un sport. En fait, elle crée une nouvelle discipline sportive. On va organiser des événements de tir avec de faux drones, qu’on va descendre. C’est fou le succès que ça a. Les journaux et les télés de tout le pays en parlent déjà. J’ai même fait chier la FAA. Elle a sorti une déclaration disant que les sanctions qui s’appliqueront aux personnes tirant sur des véhicules volants non-habités seront les mêmes que celles concernant les vols habités : c’est la prison, et tout.

Ça ne vous inquiète pas plus que ça ?
Parce que c’est normal qu’un drone vole au-dessus de chez vous pour vous surveiller ? C’est normal ? On est censé accepter ça ? Notre révolution a commencé à cause d’une taxe débile sur le thé. Là, on parle de quelque chose de beaucoup plus important.


Retrouvez l'intégralité de l'interview chez Vice.

Photo Vice.


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